Amplificateurs classe A 8 watts « Le monstre » par Hiraga


 
Contrairement à ce que son nom indique, à sa puissance effi­cace, à son travail en pure classe A, il ne s'agit pas d'une copie, d'un montage inspiré du « Monstre » I-08 de Stax. Celui ­ci ne comportait pas moins de 42 transistors dans sa section ampli­fication, Malgré ses performances, c'était un circuit trop com­plexe. En quelques mots, c'est en fait un montage inspiré du 20 W classe A. Avant de revenir sur ce circuit, d'autres essais, d'ailleurs toujours en cours, concernaient des montages comportant des sorties mono-transistor, de type germanium. La puissance limitée à 5 W, la difficulté de trouver de bons transistors de puissance au germanium ont fait que ce projet n'a pas encore abouti. D'autres essais, qui n'ont pas abouti à un résultat satisfaisant concernent plusieurs montages sommaire­ment décrits sur la figure 1.



Brièvement, nous nous sommes principalement attachés aux points suivants par rapport au montage classe A 20 W bien connu des lecteurs. Sachant, bien évidemment, que le sacrifice en matière de puissance nous autorisait une marge de manœu­vre beaucoup plus large.

· Etage d'entrée : transistors encore plus silencieux, à grand gain, mais linéaires
-- faible courant de fuite en entrée
-- impédance d'entrée plus éle­vée
-- circuit à réduction de l'effet Miller, pour réduire le taux de distorsion aux fréquences élevées
-- étage d'entrée pouvant être surmodulé sans risque de satura­tion.
· Etage driver :
-- circuit d'autocompensation de distorsion de linéarité
-- faible impédance de sortie
-- faible distorsion
-- niveau de sortie plus élevé            
-- large bande passante.
· Etage de puissance :
-- similaire au 20 W classe A
-- choix orienté vers d'autres transistors de sortie, moins puis­sants, mais supérieurs en qualité subjective.

Pour les améliorations souhai­tées sur le plan subjectif, elles ont été décrites auparavant. Certaines paraissent assez contradic­toires mais, mis à part le résultat qui le prouve, la façon de procé­der dans le choix des différents paramètres montre comment cela est possible. A part l'impré­visible, ce serait de la sonorité sur mesure. L'écoute finale ne devant pas pas surprendre, à part, peut-être, de très petits détails.

La figure 2 montre le circuit général, où l'on reconnaît l'étage de sortie « Darlingnot », en Darlington inversé. On note que l'ancienne combinaison 2SC1096/2SA634 et 2SD188/2SA627 passe à une nouvelle combinaison, un peu moins puissante mais beaucoup plus perfor­mante. Le choix des drivers est à la fois subjectif et objectif. La valeur du Cob. de 75 pF sur le 2SA634 passe à seulement 1,8 pF Sur le 2SB716. Par contre, on note un Pc beaucoup plus faible (seulement 750mW) sur le nouveau driver, valeur cepen­dant suffisante pour driver l'étage de sortie. Les paires de sortie 2SD844 et 2SB754 sont de type moulé, en nouveau boîtier. Cette paire complémentaire pos­sède un Pc de 60 W, ce qui est suffisant pour un travail en classe A sous une puissance modulée de 8 à 15W. Cette paire peut travailler sous une tension d'entrée deux fois plus faible que sur la paire 2SD188/2SA627, ce qui explique l'emploi d'un étage driver plus petit. La figure 3 montre les différences existant entre ces transistors. Noter que pour un travail en classe A jusqu'à 20 W, ces transistors n'auraient pu convenir. L'étage de sortie ainsi monté avec les 2SB7l6/2SD756 et 2SD844/2SB754 procure, par rapport aux 2SC1096/2SA634 et 2SDl88/2SA 627 :
-- un peu moins de distorsion entre 0,1 et 3 W, aux fréquences élevées (effet de Cob plus faible
des drivers) ;
-- aigu plus défini ;
-- bas médium plus ample ;
-- grave encore mieux tenu (Rbb des transistors de sortie de 3,2ohm au lieu de 7ohm) ;
-- son plus ouvert (taux de C.R. plus faible) ;
-- médium plus « chaud » mais aussi détaillé.


Fig. 2 : Circuit de l'amplificateur classe A 8 watts

Les autres avantages ne chan­gent pas. Contrairement aux amplificateurs courants, la puissance de sortie n'augmente pas quand l'impédance de charge diminue. La caractéristique puissance/impédance n'est pas descendante (amplificateurs cou­rants) mais arrondie, comme sur un amplificateur à tubes OTL. Entre 7 et 20ohms la variation de. puissance est minima et à 30ohm elle est encore importante ce qui avantage le travail sur des enceintes à haut rendement, l'impédance de celles-ci à la résonance pouvant dépasser 100ohm.

Le circuit reste de stabilité inconditionnelle, même chargé par 1uF en parallèle sur 8ohm (voir photos). L'ensemble permet d'obtenir une très large bande passante (plus de 4 MHz), un temps de montée extrêmement rapide (moins de 0,5 uS). Noter qu'une telle performance sur transistors Mos-Fet ne pour­rait être aussi stable sur charge capacitive. Un autre avantage est la possibilité de réduire la longueur des liaisons driver/transistor de puissance. D'envi­ron 18 cm sur le 20 W classe A, elle est cette fois directe, les tran­sistors de puissance pouvant se monter directement sur le circuit imprimé. Ce qui réduit les capa­cités de liaison et les éventuels risque d'instabilité.

Comme mentionné au préalable, on constate qu'il jectif exactement conformes à ce qui était souhaité ainsi que l'inconvénient d'une puissance de sortie limitée à environ 8 W.

Comme le mentionnions au préalable, on constate qu'il existe des relations très étroites entre les performances subjecti­ves et les configurations de schéma utilisés. Un travail systé­matique et rigoureux permet ainsi d'atteindre le but recher­ché, au sacrifice cependant d'un paramètre qui est, dans le cas présent, la puissance limitée aux environs de 8 W.

Transistors
VCBO
V
VEBO
V
ICm
A
PC
W
HF
VCE
V
IC
A
VCB
V
IE
mA
FT
mhZ
RON
ohm
2SD188
100
7
7
60
60
2
3
10
-200
10
7.5
2SD844
50
5
7
60
70~240
1
1
5
-1A
15
3.5
Fig. 3 : Tableau de comparaison des transistors 2SD188 et 2SD844

L'étage d'entrée

Il n'est pas du tout similaire celui qui était employé sur le 20 W classe A.

Dans ce circuit, le choix de l'étage d'entrée était primordial. Aussi curieux que cela puisse paraître, il s'agissait de retrouver ici un son proche d'un tube dri­ver réputé au Japon pour ses qualités subjectives : le WE310A, un tube pentode absolument remarquable sur la voix, la guitare, le piano, bref exception­nel dans la bande 200 - 5 000Hz. L'emploi de transistors bipolai­res peut produire facilement de la distorsion par harmoniques impairs tandis qu'une paire com­plémentaire à effet de champ produira un peu trop d'harmoni­ques impairs (son dur et desa­gréable, ce qu'explique sommairement la figure 4. Dans le cas du circuit du 20 W, le compromis consistait à employer des transis­tors bipolaires de très bonne qualité subjective, les 2SA872(E) et 2SC1775(E) dont le montage procurait un taux de distorsion plus élevé, mais un dégradé en distorsion harmonique particulièrement bon. Le second étage attaquait d'ailleurs le driver à la limite de la satura­tion, ce qui ne posa heureusement pas trop de problème, après les réglages divers (voir n0 15) et ajustage de la tension d'alimentation à +/- 21V.

Fig. 4 (a) : Spectre de distorsion sur montage cascade FET-Bipolaire.
 
Fig. 4 (b) : Spectre de distorsion sur paire complémentaire FET.

Les caractéristiques Id/Vds d'un transistor à effet de champ étant de même configuration que celles d'un tube triode d'une part, les caractéristiques de spec­tre de distorsion d'un tube 310A ne ressemblant pas tout à fait à celles d'un transistor bipolaire d'autre part, un montage com­biné de transistors va apporter simultanément ce que l'on recherche :
-- sortie à basse impédance ;
-- gain très élevé ;
-- faible distorsion ;
-- faible courant de fuite en entrée ;
-- circuit à très faible effet Miller ;
-- niveau de saturation d'entrée élevé.

Il s'agit d'une paire complé­mentaire cascode « panachée » FET/bipolaire pour laquelle le choix des transistors sera fait méticuleusement, afin d'obtenir les résultais souhaités.

Sans ce montage cascode com­plémentaire, ces résultats n'auraient pu être obtenus d'une autre façon.

Le montage cascode permet en effet l'obtention d'un gain très élevé et les risques d'instabilité, dans le cas du présent montage sont pratiquement inexistants. Dans le cas de tubes triodes à grand gain, ce n'aurait sans doute pas été le cas. Ensuite, la combinaison FET/bipolaire pro­duit une caractéristique combi­née proche d'un tube pentode. Ce qui équivaut à un spectre de distorsion avec prédominance d'harmoniques impairs. Ceci est volontaire, vu que le montage en push-pull se chargera de réduire ceux-ci d'où une combinaison d'ensemble devant apporter un bon résultat.

Un montage cascode de ce type, à sortie basse impédance apportera les améliorations sub­jectives souhaitées, c'est-à-dire plus d'ampleur dans le bas-médium, mais également un grave ferme et bien tenu (dû aussi aux circuits d'ali­mentation). Mais son avantage décisif sera un gain important en transparence. Mais l'obtention de ces résultats dépend étroitement du choix des transistors. Une condition obligatoire : utili­ser en entrée un transistor à effet de champ à Gm très élevé, de 20 à 30 fois plus élevé que celui d'un transistor Fet du genre 2SK30AGR. Employé seul, ce genre de transistor, à très faible bruit ne pourrait convenir que pour des pré-préamplificateurs et des préamplificateurs. Seul, les Fet employés ici, la paire complé­mentaire 2SKl7O/2SJ74 dont les deux seuls avantages ont un très faible bruit

      (en = 0,9 nV/√Hz)

et un Gm élevé : 2,2 mMho. Mais les défauts de ces transis­tors sont nombreux :
-- courant de fuite de gate important (perte de transparence sonore) ;
- capacités parasites Ciss et Crss (entrée et retour) importantes : 30 pF et 6 pF (au lieu de 8 et 2 pF
environ sure le 2SK30AGR) ;
-- courant de fuite de gate augmentant très rapidement lorsque la tension de travail Vds aug­mente ;
-- tension de saturation d'entrée très basse, due au gain élevé (0,2 V environ).

Un montage en cascode amé­liore considérablement ces carac­téristiques. On aurait pu monter en cascode des transistors Fet, comme sur la figure 5(a) mais la combinaison bipolaire NPN/Fet canal N est préférable (b). La avantages dêcisifs sont :
-- réduction considérable de la capacité parasite Crss (capacité de « retour » drain-gate) qui passe au 1/10e de sa valeur initiale, soit 0,06 pF au lieu de 6 pF, soit une réduction importante de l'effet Miller (figure 6);
-- abaissement de la tension de travail Vds (le montage étant en série), réduction conséquente de Igx (courant de fuite de gate), comme e montre la figure 7.
-- niveau de saturation d'entrée plus élevée (près de 1V an lieu de 0,2V).

La figure 8 montre schémati­quement le circuit d'entrée et l'équivalent électrique.
 

Fig. 5 : Montages cascode.
Fig. 6 : Réduction de l'effet Miller, grâce à l'emploi du montage cascode
 
Fig. 7 :  Réduction du courant de fuite Igx par l'emploi du montage cascode,
par rapport à celui d'un transistor FET seul.
 
Fig. 8 (a) :  Schéma électrique équivalent d'un montage cascode complémen­taire.
 
Fig. 8 (b) : Circuit cascode complémentaire.

Ce montage s'est montré, par ailleurs, plus intéressant qu'un transistor FET standard monté avec régulateur de courant : moins de gain, impédance de sortie élevée, perte de dynamique subjective, effet de la capacité de sortie sur la distorsion.

Dans ce montage, l'impédance d'entrée, qui est élevée est char­gée par 47 kohm et une résistance d'arrêt de 1,2 kohm est montée en série dans le circuit d'entrée. Le circuit cascode complémentaire est chargé par seulement 47 kohm, le courant étant de l'ordre de 0,9 à I mA. Les bases sont polarisées par les quatre résistances de 2 kohm et les divers essais de régu­lation (diodes zeners) se sont montrés inférieurs à l'écoute. Le choix de la combinaison 2SK170-2SJ74/2SC1775-2SA872 a
encore été effectué sur des critè­res subjectifs, en fonction, bien sûr, du résultat global.

Dans le prochain numéro, le montage et d'autres éventuels réglages seront détaillés, ainsi que l'imposante alimentation de +/- 14 V, sur batterie au plomb montées en tampon. Le lecteur trouvera par contre sur la figure 10 le circuit imprimé de ce montage.

Mesure et écoute

Ce circuit a été soigneusement mis au point, à la mesure comme à l'écoute, en avril 1982. Il avait été « mis de côté » pour une question de transistors dont le choix apportait un résultat dépassant même les prévisions, sur le plan de j'écoute mais qui étaient encore très difficiles à se procurer sur le marché japonais. La paire 2SD844/2B754 était particulièrement difficile à trou­ver, le Hfe ne correspondant pas aux valeurs souhaitées, Ce Hfe, de 60 sur les 2SA627/2SD188 est ici compris suivant les lots (K, L, M, N, O) entre 70 et 240 et seuls les lots K et L (2SD844K et 2SB754L) peuvent convenir. Quant aux 2SK170/2SJ74, ce sont des transistors encore assez difficile à trouver, car récents et fabriqués seulement en petite série par la firme Toshiba.

Pour 'écoute, dont le résultat dépend aussi de l'alimentation, on arrive au curieux mais éton­nant compromis tubes triodes/amplificateur Hiraga 20 W classe A, où seule la puissance de sortie représente une petite ombre sur le tableau de perfor­mances. Dans l'ensemble, on obtient un son particulièrement défini, aéré, des sons de réverbé­ration, d'échos plus libres, alors que les sons directs sont encore plus présent, mieux timbrés et plus « chauds ». Le paradoxe se situe dans le grave qui, avec l'imposante alimentation, peut enfin se comparer à celui des amplificateurs Kanéda classe A 30 W et 50 W : fermeté excep­tionnelle, superposition de sons extrêmement fermes sur des son infiniment doux et légers. Super­position de sons infiniment flous sur des sons aux contours finement ciselés.

Même sur des systèmes de ren­dement moyen, cet amplificateur s'est très bien comporté, l'impression  équivalente d'espace, de réserve de puissance ne pouvant normalement être obtenue qu'avec de rares amplificateurs cités plus haut.

Baptisé « Le Monstre », en raison de sa taille anormalement grande par rapport à sa puis­sance de sortie, il aurait pu encore être baptisé « Tube Memory », à cause de son tim­bre propre à quelques rares amplificateurs à tubes triodes qui étaient jusqu'ici employés dans des montages dits « à très haute définition ». Cet appareil trouvera sa place idéale en bas-médium, en médium ou dans l'aigu, dans des systèmes bi, tri ou quadri amplifiés.
 
Fig. 9 (a) :  Réponse sur signal carré à 20Hz. En haut,
sortie amplificateur, en bas, sortie générateur.
 
Fig. 9 (b) :  Réponse sur signal carré à 20 kHz sur
charge capacitive, 0,47 uF en parallèle sur 8 ohm.
 
Fig. 9 (c) :  Allure du front de montée à 10 kHz. Le temps
de montée est inférieur à 0,5 uS.  Il est difficilement
mesurable avec le banc de mesure qui étai employé.
 
Fig. 10 :  Circuit imprimé et implantation

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