Mesure d'un courant

Présentation

La mesure de l'intensité d'un courant électrique peut paraître toute simple dès lors que l'on utilise un appareil tout fait qui fonctionne bien. Mais on a aussi vite fait de faire une erreur de mesure qu'avec un voltmètre mal choisi... Comme pour toute mesure, il incombe de bien connaitre son appareil de mesure et d'en connaitre ses limites. Il existe plusieurs façons de mesurer un courant :
  • par intrusion (insertion) de l'appareil de mesure dans le circuit alimenté
  • par couplage électromagnétique style transformateur de courant
  • par effet Hall
Cette page décrit très brièvement les deux premières méthodes.

Mesure d'un courant par intrusion

Cette première méthode, recommandée pour les courants de faible ou moyenne valeur, est simple à mettre en oeuvre pour la mesure d'un courant circulant dans un montage entier, mais est plus difficile à appliquer pour la mesure du courant circulant dans une portion de montage. Elle consiste à insérer une résistance de valeur connue en série avec l'alimentation, et de mesurer la chute de tension qu'elle provoque.



Exemple
Sur le schéma synoptique qui suit, on voit un circuit (représenté par le rectangle bleu) alimenté par une source de tension continue BAT de 12V (une batterie au plomb, par exemple). On aimerait bien connaître le courant I débité par cette source de tension BAT, d'une part pour vérifier que tout se passe bien, et d'autre part pour estimer le plus justement possible l'autonomie que l'on peut attendre du système.

mesure_courant_001a

L'insertion d'un ampèremètre ou d'un controleur universel réglé en mode Ampèremètre, en série avec l'alimentation, est donc la première idée qui peut venir à l'esprit, comme le montre le schéma suivant :

mesure_courant_001b

Comme on peut déjà avoir un ordre de grandeur du courant consommé sans en connaître précisement la valeur (sinon le questionnement n'aurait aucune raison d'être), l'ampèremètre est positionné sur le calibre permettant la mesure la plus précise possible. Dans le cas présent il s'agit du calibre 200 mA, le plus faible disponible sur l'appareil utilisé. Cette méthode impose l'ouverture du circuit d'alimentation pour le branchement de l'appareil de mesure, ce qui généralement ne pose pas trop de problème. Mais on peut aussi préférer placer un système de mesure à demeure, indépendant de son multimètre qui peut servir à plein d'autres choses. L'idée est donc d'insérer une résistance en série avec l'alimentation, afin de pouvoir mesurer en permanence la tension développée à ses bornes, comme le montre le schéma suivant.

mesure_courant_001c

La mesure donne maintenant une valeur en unité "volt" ou "millivolt", ce qui impose la conversion en unité "ampère" ou "milliampère". Là où précédemment on lisait 12 mA, on lit maintenant 12 mV. La conversion d'unité est aisée, dès l'instant où l'on connait la formule "U = R * I", dont on peut aisement dériver la formule "I = U / R". Le choix de la valeur de la résistance série RS parait alors évidente, car en lui donnant la valeur de 1 ohm, la valeur de I est égale à la valeur de U : la valeur affichée en volt correspond exactement à la valeur en mA réelle : les 12 mV affichés correspondent à un courant de 12 mA.

Miraculeux !
Les choses sont donc aussi simples que cela : ajouter une résistance de 1 ohm en série avec l'alimentation du montage, et en lisant directement la tension à ses bornes, en déduire instantanément le courant consommé... Il est possible que ce fonctionnement "universel" pose problème dans certains cas... Pour se faire une idée des résultats obtenus dans d'autres contextes avec ce procédé fort simple, examinons la chose avec deux autres circuits, un qui consomme très peu de courant (12 uA), et un qui en consomme beaucoup plus (1,2 A).

Résistance de 1 ohms avec un circuit consommant 12 uA
Dans le circuit précédent, on pouvait assimiler la résistance interne du circuit électronique alimenté à une valeur proche de 1 KO, puisque l'on constatait une intensité de 12 mA pour une source de tension de 12 V (rapport de mille en absolu). La résistance ajoutée RS de 1 ohms était de valeur faible par rapport à cette résistance interne, et pouvait être considérée comme très peu pertubatrice, même si elle provoquait un tout petit abaissement du courant consommé (chute d'environ 0,1 %). En mesurant une consommation de 12 uA sous une même source de tension de 12 V, on peut raisonnablement penser que la résistance interne du montage est voisine de 1 MO. Une résistance shunt RS de 1 ohms (le terme shunt est souvent utilisé pour désigner une résistance de faible valeur utilisée pour la mesure de courant) placée sur le parcours de l'alimentation aura ici une influence encore plus négligeable, et on peut espérer une valeur lue encore plus juste. Voyons cela de près.

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Ah... la tension mesurée est de 0,01 mV, et le calibre du voltmètre est le plus faible dont on puisse disposer. Nous sommes donc en présence d'un manque de précision au niveau de la mesure elle-même. Car si le courant effectif est bien de 12 uA, on lit une valeur de 10 uA : l'erreur de mesure est donc de 20 %, valeur totalement inacceptable. La solution est d'utiliser un voltmètre capable de mesurer et d'afficher les microvolts, ce qui n'est pas forcement une solution simple pour tout le monde. Autre approche : augmenter la valeur de la résistance série RS jusqu'à ce que la tension chutée soit exploitable avec un voltmètre classique. En portant cette résistance série RS à une valeur de 1 KO, soit 1000 fois plus grande que la valeur précédente, la tension chutée devrait être mille fois plus importante... en théorie. Car bien évidement, ce n'est pas tout à fait le cas. En augmentant la résistance dans le circuit d'alimentation, le courant consommé sera forcement affaibli. Le tout est, comme précédement, de ne l'affablir que très peu (par rapport au courant consommé en absence de cette résistance), d'une part pour ne pas trop perturber la mesure, mais plus important encore, pour ne pas perturber le fonctionnement du montage lui-même. Sur le schéma qui suit, nous retrouvons donc notre résistance RS de 1 KO, dont la valeur est à comparer aux 1 MO de la résistance interne du circuit alimenté.

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Et voilà. En adoptant une valeur de 1 KO pour RS, on mesure 12 mV qui correspondent à une valeur de 12 uA (I = U / R = 12 mV / 1 KO). Le fonctionnement du montage n'est pas perturbé, car la chute de courant occasionnée par l'ajout de RS est de 0,1 % et peut être considérée comme négligeable. Première conclusion que l'on peut tirer de cette expérience : la résistance série RS doit avoir une valeur faible en regard de la résistance interne du montage alimenté, tout en ayant une valeur assez élevée pour y développer une tension facile à mesurer.

Résistance de 1 ohms avec un circuit consommant 1,2 A
Que se passe-t-il maintenant si on insère une résistance RS de 1 ohms, dans le circuit d'alimentation d'un montage consommant un courant nominal de 1,2 A ? Si le courant traversant RS est de 1,2 A, on devrait en théorie avoir une chute de tension de 1,2 V à ses bornes. Le montage ne sera certes plus alimenté que sous 10,8 V, mais cela ne devrait pas poser de problème, n'est-ce pas. Faisons la mesure.

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Oups... 1,09 V aux bornes de la résistance RS. On peut penser que le montage attendant une tension de 12 V et qui ne reçoit que 10,9 V ne fonctionnera peut-être pas tout à fait conformément aux attentes : le courant consommé est passé de 1,2 A à 1,09 A, soit environ 10 % de moins. Et la résistance RS, qui dissipe une puissance de plus de 1 W, chauffe beaucoup car l'auteur avait la tête ailleurs et avait choisi un modèle 0,5 W. Sans avoir fait de hautes études (ce qui est mon cas), on peut en déduire que la méthode de mesure n'est pas bonne. Ou si la méthode elle-même est correcte, la valeur donnée à RS gagnerait sans doute à être révisée. Si on avait eu le même raisonnement que tout à l'heure, on aurait su que la résistance interne du montage est voisine de 10 ohms (1,2 A sous 12 V), et on aurait constaté de suite que la valeur de RS n'était pas assez petite en proportion. Adoptons donc comme tout à l'heure une valeur de rapport un millième, soit pour RS une valeur de 0,01 ohms (10 milli-ohms).

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Cette fois, nous mesurons une chute de tension de 12 mV dans la résistance RS de 0,01 ohm, ce qui correspond à un courant de 1,2 A. Le montage alimenté voit une perte de tension de 12 mV, ce qui est tout de même plus acceptable qu'une perte de 1,1 V. La conclusion que l'on peut tirer de cette dernière expérience rejoint celle de l'expérience précédente : la valeur de la résistance RS doit être bien plus petite que la résistance interne du montage alimenté, de sorte que la chute de tension occasionnée soit limitée à quelques mV. Si on désire pouvoir faire des mesures sur une grande plage de courants possibles, il convient d'utiliser plusieurs résistances de valeurs différentes, adaptées à chaque calibre de mesure.

Mon revendeur ne dispose pas de résistance de 0,01 ohm
Certes, une résistance de si petite valeur n'est pas aussi courante qu'une résistance de 1 KO ou de 47 KO. On peut trouver facilement des résistances de 0,1 ohm (voir photo ci-après) mais en dessous c'est plus difficile.

resistance_puissance_001 - 10W - 0,1 ohm

Car généralement, les résistances de très faible valeur n'ont pas la forme que l'on peut penser. Il peut en effet s'agir d'un morceau de piste d'un circuit imprimé, d'un morceau de métal rigide en forme de languette (longue et plate) ou de pont, ou encore du fil résistif utilisé pour les résistances chauffantes (fil Kanthal de 1 ohm par mètre par exemple).

resistance_puissance_002

Dans un appareil de test, il peut aussi s'agir d'une résistance "électronique" constituée d'un transistor de puissance assurant un court-circuit franc et commandé en PWM (la résistance vue aux bornes du transistor peut ainsi avoir une valeur que l'on peut programmer).

Remarque : les valeurs de résistivité de l'ordre du milliohm correspondent aussi aux "résidus" de contacts électriques, aux valeurs minimales de certains transistors de puissance MOS en mode passant. Ce sont celles que l'on traque (car on veut les éviter ou tout du moins les contrôler ou les compenser) dans les montages à forte consommation électrique.


Mesure d'un courant par couplage

Cette seconde méthode est peut-être plus largement utilisée pour la mesure de forts courants, mais elle convient aussi pour des courants modestes de quelques dizaines de microampères (mesures de courants de fuite) ou de quelques centaines de mA. Elle fait appel à des capteurs de courant ou à des transformateurs de courant, constitués d'une bobine (une seule ou plusieurs spires) au travers de laquelle on place le conducteur électrique véhiculant le courant à mesurer.

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Lorsque le conducteur électrique véhiculant le courant à mesurer est parcouru par un courant, il crée autour de lui un champ magnétique qu'il suffit de capter et de reconvertir en tension, fonction réalisée par la bobine et plus ou moins d'électronique associée. Quand le conducteur en question ne peut être coupé pour les besoins de la mesure, on doit faire appel à un système où la boucle de mesure peut s'ouvrir (pour la mise en place autour du conducteur) et se fermer (pour que la mesure puisse s'effectuer). Un tel système peut se présenter sous forme de cable rigide à contact électrique ou sous forme de pince.

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Pince ampermétrique

Mesure d'un courant par effet Hall

Ce type de mesure se base sur l'emploi d'un capteurà effet Hall, qui produit une tension qui est le reflet linéaire du courant détecté.

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